Alors que la Pologne offre un paysage médiatique varié, la conscience publique de la liberté de la presse demeure encore faible. Pendant les huit ans de gouvernement du parti Droit et justice (PiS), les médias publics ont été transformés en instruments de propagande et les médias privés soumis à diverses pressions. La victoire de l’opposition fin 2023 représente une opportunité d’améliorer le droit à l’information.
Paysage médiatique
Le marché privé est relativement pluraliste, avec des médias indépendants comme la chaîne TVN, le quotidien Gazeta Wyborcza ou le site d’information Onet.pl. L’ancien gouvernement a transformé les médias publics, et notamment le groupe TVP, en instruments de propagande gouvernementale et a pris le contrôle du réseau des journaux locaux, PolskaPress, à travers son acquisition par la société pétrolière Orlen, majoritairement possédée par l’État.
Contexte politique
Depuis la prise du pouvoir par une coalition menée par Donald Tusk, début 2024, les attaques verbales et les procédures-bâillons (SLAPP) de la part du gouvernement à l’égard des médias privés ont diminué. Quant aux médias publics, ils font l’objet d’une bataille politique opposant le nouveau gouvernement – qui met en place une réforme fragile – et les institutions contrôlées par le parti du gouvernement précédent, le PiS, qui tentent de l’en empêcher.
Cadre légal
Bien que la Constitution garantisse la liberté de la presse et le droit à l’information, l’ancien gouvernement a tenté de les restreindre grâce à une législation spécifique sous prétexte, par exemple, de lutter contre l’espionnage et l’influence de la Russie. L’actuel gouvernement a continué de restreindre l’activité des journalistes à la frontière biélorusse, où des douzaines d’immigrants, sur les centaines qui tentaient d’entrer en Pologne, ont péri. Le Conseil national de radiodiffusion – régulateur des médias – tente d’influencer le contenu éditorial en utilisant le recours juridique de la protection de la “raison d’État”. L’“insulte” à certaines institutions et la diffamation restent passibles d’une peine de prison.
Contexte économique
La radiodiffusion publique est financée par l’État, tandis que les médias privés comptent sur des modèles d’abonnements, grâce à la taille relativement importante du marché polonais. Ils ont fait face à une tentative avortée d’affaiblissement à travers une taxe spéciale visant leurs revenus publicitaires. La publicité publique est attribuée sans la transparence nécessaire. Quant aux “journaux gouvernementaux locaux” publiés grâce à l’argent public, ils font souvent concurrence à la presse indépendante sur le marché publicitaire.
Contexte socioculturel
La polarisation croissante de la société a entraîné une augmentation des attaques verbales contre les journalistes. Les citoyens conservateurs tentent de les décourager de couvrir les sujets LGBTQI+ ou liés au genre, et le blasphème reste passible d’emprisonnement. Les médias indépendants bénéficient néanmoins d’un grand soutien d’une partie importante de la population, qui a protesté, par exemple, contre la loi sur la radiodiffusion relative à la détention de parts étrangères dans les médias, qui aurait obligé le principal groupe télévisé du pays, TVN, à changer de propriétaire et aurait pu permettre au précédent gouvernement de prendre le contrôle du groupe, si le président n’avait pas mis son veto.
Sécurité
Après un pic en 2020, lors de la “grève des femmes”, le niveau de violence – de la part de la police, mais aussi des groupes extrémistes opposés à ce mouvement – a diminué. Les attaques contre les journalistes ont cependant montré que les autorités chargées de faire respecter la loi ne peuvent ni les protéger efficacement ni garantir leurs droits lors des manifestations. Depuis le début de la guerre en Ukraine, les journalistes travaillant sur les questions liées à la Russie sont particulièrement vulnérables.